Parlons de la conférence de tous les Savoirs animée par Jean-Pierre Souchon, le 12 novembre 2024 !

De Fanny Le Meurlay & Flavie de Komarowski (en Service Civique à l’UIAD) :

Le 12 Novembre 2024 Jean-Pierre Souchon, ancien rédacteur en chef du Dauphiné Libéré, aussi ancien responsable de onze rédactions dans l’Est nous a fait le plaisir de présenter une conférence. Par le passé il avait déjà présenté d’autres conférences pour l’UIAD, et est revenu ce mardi 12 novembre pour une conférence sur le rôle de la presse entre les faits divers et les faits de société. Il nous pose une question, question qu’il s’est lui-même posée : comment un fait divers devient il un fait de société ? Il nous a conté sa carrière de journaliste et de rédacteur en chef et certains faits divers qu’il a traités de près ou de loin, accompagné par des images d’archives de presses locales, nationales, internationales remontant jusqu’aux années 1950. Plus qu’un historique de la presse des faits divers, Jean-Pierre Souchon nous a proposé une relecture de l’évolution de la presse. Ensemble, nous nous sommes rappelés que les événements qui ont choqué et ému la population en paraissant dans la presse sont aussi parfois ceux qui ont aidé à faire passer des lois (procès de Bobigny, incendie du 5/7…). Les tragédies sont parfois celles qui font avancer les choses, puisqu’elles sont le reflet de l’intimité de la société. Jean-Pierre Souchon conclut en nous rappelant les mots de Pierre Bourdieu, qui nous incite à la vigilance face à ces médias qui hantent les esprits des citoyens.

Questions posées par le public et réponse de Jean-Pierre Souchon :

Q : Certains évènements importants pour des populations locales, comme des coupures de câbles électriques qui plongent plusieurs villes dans le noir pendant plusieurs jours, peinent à remonter dans les informations nationales, tandis que de petites informations avec un moindre impact y arrivent. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ?

R : Les affaires locales peinent à être visibles, car lorsqu’un journal national fait un déplacement pour couvrir un sujet de terrain, ils ne restent généralement qu’un jour ou deux. Les médias nationaux n’ont pas à se « confronter » aux autorités locales, comme un journal local peut et doit le faire quotidiennement. Certaines informations sont volontairement cachées au public pendant un temps, pour ne pas obstruer une enquête, par exemple. Sans s’autocensurer, les journalistes doivent aussi faire preuve d’éthique et de déontologie : déjà leur carte de presse peut être retirée par une commission, mais ils doivent surtout garder en tête qu’une erreur est toujours possible dans une publication. Jean-Pierre Souchon nous conte une fois où le journal avait accès à des photos d’un suspect d’une affaire récente, aubaine pour la rédaction, et s’apprêtait à les publier, mais s’y sont finalement refusés. Le suspect en question a été innocenté dans les jours suivants.

Q : Quel regard portez-vous sur la liberté des journalistes par rapport aux magnats de la presse tels que le groupe Bolloré, etc. ?

R : Le Dauphiné Libéré a effectivement été racheté par le groupe Dassault pendant un temps et est actuellement sous la direction du Crédit Mutuel, mais ces acquisitions ne signifient pas forcément que les journalistes reçoivent des directions différentes. L’exemple du groupe Bolloré est encore différent, puisque c’est l’un des plus gros groupes français en éditions et communications. On peut se poser la question d’une liberté d’expression de façade pour les journalistes, qui servent parfois de caution sur les plateaux. Jean-Pierre Souchon déplore surtout le manque de médiation et de journalisme, là où certains servent plus d’animateurs qu’autre chose. Certains journalistes en sont aussi arrivés à refuser certaines directives, préférant se concentrer sur leurs missions professionnelles.

Q : Par rapport à la réflexion de Bourdieu, pourquoi justement ne pas essayer de remplir les cerveaux ?

R : Le citoyen n’exerce plus ses droits démocratiques, on le voit à chaque élection, mais tout n’est pas forcément perdu. Jean-Pierre Souchon nous parle des affaires de voitures brûlées dans les quartiers de métropoles, où l’on a critiqué les journalistes par peur d’un mimétisme. Il nous rappelle que les gens concernés sont souvent des familles défavorisées, dont les voitures sont souvent le seul bien réel possédé. Il était important de montrer les soucis de ces familles, souvent invisibles dans les champs médiatiques.

La citation de Bourdieu mentionnée dans la conférence : “La télévision a une sorte de monopole de fait sur la formation des cerveaux d’une partie très importante de la population. Or, en mettant l’accent sur les faits divers, en remplissant ce temps rare avec du vide, du rien ou du presque rien, on écarte les informations pertinentes que devrait posséder le citoyen pour exercer ses droits démocratiques.” Pierre Bourdieu, 1930-2002, Sur la télévision, 1996.

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