L’homme nu…
L’HOMME NU OU LA DICTATURE INVISIBLE DU NUMERIQUE
Grâce à la complicité entre un écrivain, Marc Dugain et un journaliste d’investigation, Christophe Labbé, ce petit livre de 186 pages provoque un questionnement sur ce que nous pouvons devenir dans ce monde envahi par le numérique.
Les auteurs ne sont pas catastrophistes, mais ils s’ interrogent sur les risques de « reformater » l’humanité. Comment garder une conscience critique face à cette nouvelle dictature des Big Data qui nous menace ? Les auteurs se révoltent comme Platon dans le mythe de la caverne : dans le monde des Big Data, nous sommes enchainés comme jamais à des illusions, c’est comme si on nous avait encapsulé dans un miroir déformant, le reflet de la réalité devenu dans nos têtes plus important que la réalité elle-même. De même, ils se réfèrent à Georges Orwell dans son livre « 1984 » : le monde des Big Data est celui d’une hégémonie douce mais totalitaire !
C’est un ouvrage percutant voir militant pour lutter contre deux idées soutenues par les Big Data, mais qui sont insupportables pour ces deux humanistes qui ont écrit tous les deux sur les méfaits de la guerre:
– supprimer le hasard, l’imprévisible. Quantifier, mesurer, étalonner telle est la norme imposée, surtout ne jamais travailler sur les causes, mais uniquement sur les résultats.
– annuler l’Etat dans sa forme actuelle. La démocratie est inadaptée, et est l’ennemi à abattre. Les règles de régulation du commerce sont obsolètes.
C’est un livre de résistance, puisque aujourd’hui, il s’agit de remettre l’humain au centre, de protéger la sensibilité, l’intuition, l’intelligence du chaos comme moteurs de l’être humain. C’est lutter contre cette nouvelle guerre du numérique qui veut faire de nous uniquement des produits de consommation.
Mireille Flageul
Marc Dugain et Christophe Labbé , L’HOMME NU OU LA DICTATURE INVISIBLE DU NUMERIQUE , Pocket, 2017 (192 p.)
Lecture complémentaire : LE NAVIGATEUR OBSOLETE de Virgile Stark –
Virgile Stark, bibliothécaire à la BNF est « un accro » aux réseaux sociaux et dénonce ses méfaits : « La page écran m’attire irrésistiblement hors d’elle, comme si elle m’invitait sans cesse à fureter et à me perdre. Je ne puis demeurer concentré plus d’une minute ». Le réseau, sa tentaculaire présence nous envahit, nous colonise et nous transforme. Nous sommes des « internés ». Une fièvre s’empare de nous. Comment ne pas céder à l’ivresse de l’échange, à l’absence de confrontation, à la réponse immédiate qui nous donne la toute-puissance ? Un livre qui dérange et qui fait réfléchir sur notre liberté.
Virgile Stark, Le Navigateur obsolète, Les Belles letttres, 2016 (140 p.)