Un spectacle chilien à la MC2 de Grenoble

De Marie-Paule, étudiante en espagnol :

Les 13 et 14 novembre derniers, la MC2 de Grenoble accueillait une artiste chilienne cocréatrice et interprète du spectacle « Minga de una casa en ruinas ». Difficile de traduire le mot « minga » qui correspond à une tradition préhispanique de l’archipel de Chiloë en Patagonie chilienne. Cette tradition consistait à déplacer sa maison, sur terre ou sur mer si besoin, à l’occasion d’un événement marquant dans sa vie tels un mariage ou un déménagement. Tout le village, solidaire apportait son aide et participait à ce déplacement.

Le spectacle commence par une vidéo d’une maison flottant sur la mer.

Peu à peu, seule en scène, Ebana Garin Coronel va déplacer, animer, transporter, suspendre des lattes de bois qui, avec les jeux de lumière prennent des allures de mobiles colorés et chantants.

Beaucoup de poésie dans ce spectacle qui mêle texte, vidéo, arts plastiques pour aborder trois thèmes sensibles : l’habitat, la propriété, l’exil. L’artiste s’inspire de sa propre vie pour traiter le sujet : elle a découvert avec son ami en Patagonie chilienne une maison en ruines dont le propriétaire, Don Dalgo, lui explique qu’il a « jeté » sa maison avec tous ses biens à l’intérieur, plutôt que de la céder comme ses voisins l’ont fait, à des promoteurs immobiliers avides d’espace pour le développement de complexes touristiques. Il l’a laissé mourir, se détruire… Ebana a rapporté dans ses valises des éléments de bois de cette maison en ruines. Ceci lui rappelle la maison qu’elle a habitée en Équateur entre 4 et 6 ans , alors que ses parents avaient dû s’exiler pour échapper à la dictature chilienne. Ce lieu d’exil a aussi été le lieu de sa petite enfance et quand ses parents ont pu rentrer au Chili, qu’ils ont quitté cette habitation, ils ne voulaient pas abandonner là leurs souvenirs et ont demandé à un voisin de faire tomber un arbre sur le toit de la maison pour la détruire. Le message qui est donné est « comment bâtir un futur sur des ruines ? Combien de maisons ou de foyers faut-il voir disparaître pour comprendre qui nous sommes ? »

Ebana Garin Coronel appartient au collectif « Cuerpo Sur » qui compte six artistes des arts du spectacle. Ce groupe aborde des sujets touchant à la mémoire, au territoire à la politique. Ebana Garin Coronel et Luis Guenel ont présenté leurs œuvres en Amérique Latine et dans plusieurs pays d’Europe et d’Asie.

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